Radiothérapie de la tête et du cou : ce que vous devez savoir sur la déglutition

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Temps de lecture: Environ 9 minutes

Les informations suivantes décrivent les troubles de la déglutition pouvant découler d’une radiothérapie de la tête et du cou, et ce que vous pouvez faire pour les éviter.

Déglutition normale

De nombreux muscles et nerfs participent à la déglutition (Figure 1).

Figure 1. Muscles et structures contribuant à la déglutition

Figure 1. Muscles et structures contribuant à la déglutition

 

Lorsque vous mangez ou buvez, les aliments (solides et liquides) se mélangent à votre salive. La salive humidifie et ramollit ces aliments, tandis que la mastication les décompose en petits morceaux. Lorsque vous mâchez, la salive se mêle aux aliments pour former ce que l’on appelle le bol alimentaire.

Lorsque vous avalez, la langue propulse ce bol alimentaire vers l’arrière de votre bouche. Se déclenche alors un réflexe de déglutition, et l’arrière de votre langue repousse la nourriture dans l’œsophage.

Au même moment, le larynx se ferme pour que les aliments ne puissent pas passer dans la trachée (voies respiratoires). Le bol alimentaire descend ensuite le long de l’œsophage et arrive dans l’estomac.

Parfois, les aliments ou les liquides peuvent stagner dans l’œsophage, ou pénétrer dans les voies respiratoires ou les poumons. Cela se produit en cas de faiblesse des muscles de la bouche ou de la gorge, ou lorsque ces muscles ne fonctionnent pas correctement. Ces deux situations peuvent s’avérer dangereuses.

Lorsque des particules alimentaires ou des liquides pénètrent dans les voies respiratoires ou les poumons, on parle alors d’aspiration ou de fausse route. Ce dysfonctionnement peut entraîner des problèmes de santé, tels que :

  • Une pneumonie, c’est-à-dire une infection de l’un ou des deux poumons
  • Des infections respiratoires, qui affectent votre nez, votre gorge, vos voies respiratoires, voire les trois

Effets potentiels du cancer et de la radiothérapie sur la déglutition

La radiothérapie peut affaiblir les muscles et les structures qui vous aident à avaler. Cela dépend de la taille et de l’emplacement de la tumeur. Elle peut aussi empêcher ces muscles et structures de fonctionner aussi bien qu’avant le début de la radiothérapie. Manger ou boire normalement peut alors devenir plus difficile.

La radiothérapie peut provoquer :

  • Une douleur au moment d’avaler
  • Une inflammation des muqueuses buccales, c’est-à-dire des zones douloureuses ou des plaies dans la bouche ou la gorge
  • Une sècheresse buccale
  • Une salive épaisse
  • Un gonflement dans la bouche, la gorge ou les deux
  • Une altération du goût

Ces symptômes apparaissent généralement une à deux semaines après le début de la radiothérapie. Ils peuvent s’aggraver au cours du traitement. La plupart de ces symptômes disparaissent habituellement 2 à 4 semaines après la fin du traitement.

La radiothérapie peut aussi engendrer des fibroses, c’est-à-dire la formation de tissu cicatriciel permanent (qui ne disparaît pas). dont les effets dépendent de la zone traitée. En voici quelques symptômes :

  • Le trismus, qui est en fait une contraction des muscles masticateurs. Les muscles de la mâchoire étant contractés, ouvrir la bouche et mâcher peut alors devenir difficile.
  • Vos glandes salivaires peuvent ne pas produire suffisamment de salive. Votre bouche étant alors trop sèche, il peut devenir difficile d’avaler.
  • Les muscles de votre langue et de l’arrière de votre gorge peuvent ne plus bouger aussi bien. Pousser les aliments ou les liquides dans la gorge et ouvrir l’œsophage devient parfois plus difficile.
  • Les muscles qui protègent vos voies respiratoires lorsque vous avalez peuvent s’affaiblir, et se révéler trop faibles pour empêcher les aliments ou les liquides de bifurquer dans les voies respiratoires.
  • Votre œsophage peut se rétrécir. Des particules alimentaires peuvent alors rester coincées au fond de votre gorge.

Tout le monde ne rencontre pas ces problèmes, et votre traitement sera planifié au mieux pour réduire ces risques. Votre équipe soignante vous expliquera également comment faire pour prévenir et gérer ces problèmes.

D’autres traitements peuvent également affecter le mécanisme de déglutition. Une opération chirurgicale peut altérer certaines parties de la bouche et de la gorge, et rendre la déglutition plus difficile. Certaines chimiothérapies peuvent également provoquer des lésions dans la bouche et la gorge. La déglutition devient alors parfois douloureuse.

Gestion des troubles de la déglutition

Le trouble de la déglutition est appelé dysphagie. Votre équipe soignante vous aidera à la gérer. Cette équipe comprend vos médecins, des infirmiers, un spécialiste de la déglutition et un diététicien nutritionniste.

Vous consulterez un spécialiste de la déglutition avant, pendant et après votre traitement. Cette équipe :

  • vous expliquera les effets potentiels de ce traitement sur vos capacités de déglutition ;
  • vous donnera certains exercices à pratiquer pour étirer et renforcer les muscles impliqués dans la déglutition ;
  • guettera tout changement potentiel dans votre capacité à avaler tout au long de votre radiothérapie ;
  • vous indiquera quels aliments et boissons présentent moins de danger pendant et après la radiothérapie ;
  • vous aidera à préserver vos capacités de déglutition après le traitement afin de prévenir tout dommage à long terme (qui dure longtemps) ou à retardement (qui se manifeste bien après le traitement).

Déglutition douloureuse

Si avaler devient douloureux, votre équipe soignante vous prescrira un antalgique à même de vous soulager. Pour prendre ce médicament, respectez bien les consignes de votre médecin. S’il ne soulage pas votre douleur, parlez-en à votre médecin ou à un infirmier. De nombreux médicaments différents sont susceptibles de vous aider à mieux gérer la douleur.

Aspiration

Lorsque vous avez du mal à avaler, les aliments (solides ou liquides) peuvent s’accumuler (rester bloqués) au fond de votre gorge, ce qui augmente les risques d’aspiration d’aliments. Les signes d’aspiration sont les suivants :

  • Toux lorsque vous avalez
  • Toux après déglutition
  • Altération de votre voix lorsque vous mangez ou buvez

Si l’une de ces anomalies se produit, contactez immédiatement votre spécialiste de la déglutition. Il vérifiera alors si votre capacité de déglutition a évolué. Dans l’affirmative, il pourra vous recommander des aliments et des liquides adéquats, plus faciles à avaler. Il pourra également vous conseiller des exercices de déglutition qui vous aideront à préserver votre capacité à avaler.

Contactez immédiatement votre médecin ou infirmier dès que vous présentez l’un des symptômes suivants :

  • Essoufflement
  • Respiration sifflante (bruit de sifflement ou de grincement lors de la respiration)
  • Respiration douloureuse
  • Toux accompagnée de sécrétions ou de mucosités
  • Température supérieure ou égale à 38°C

Ces symptômes peuvent être le signe d’une pneumonie ou d’une infection respiratoire.

Trismus

On parle de trismus lorsqu’on ne peut plus ouvrir la bouche avec l’amplitude habituelle. Un trismus peut survenir à tout moment : pendant le traitement, juste après, voire des années plus tard.

Lorsque vous ne pouvez pas ouvrir la bouche en grand, votre médecin a du mal à examiner la zone. Il peut également devenir difficile de :

  • Avoir une bonne hygiène buccale (bien se laver les dents et la bouche). Ce qui peut entraîner une mauvaise haleine, des caries ou des infections.
  • Mâcher et avaler : manger et boire peut alors devenir compliqué.
  • Parler
  • Embrasser
  • Devoir être intubé(e), par exemple si vous avez besoin d’une anesthésie générale (médicaments destinés à vous endormir pendant une intervention chirurgicale)
  • Bénéficier des soins dentaires courants

Lorsqu’un trismus se développe, il est très difficile de le traiter. Il est donc important de prévenir le trismus et de le traiter le plus tôt possible. Votre spécialiste vous donnera des exercices à faire pour prévenir le trismus. Il est également important de maintenir une bonne hygiène bucco-dentaire et une posture correcte.

Exercices

L’objectif des exercices suivants est de prévenir toute évolution négative de vos capacités de déglutition durant votre radiothérapie. Ils vous aideront également à maintenir votre capacité à avaler au fil du temps. Votre spécialiste de la déglutition (ORL ou orthophoniste) vous indiquera les exercices adaptés à votre cas et quand les commencer. Ces exercices ne vous aideront en rien si vous :

  • les commencez trop tôt après la chirurgie ;
  • les commencez trop tôt avant la radiothérapie.

Si vous devez avaler lors d’un exercice, servez-vous uniquement de votre salive, dans la mesure du possible. Si cela est nécessaire, vous pouvez aussi prendre de petites gorgées d’eau pour vous aider.

Effectuez chaque exercice 3 fois par jour. Répétez chacun de ces exercices à 10 reprises avant de passer au suivant. Votre ORL vous demandera éventuellement de les effectuer plus ou moins souvent. Dans ce cas, respectez ses consignes.

 

Exercices de déglutition

Exercice de renforcement de la langue (manœuvre de Masako)

  1. Placez le bout de la langue entre vos dents de devant.
  2. Avalez votre salive en gardant le bout de la langue entre vos dents de devant.

Entre chaque déglutition, détendez-vous et ramenez votre langue en position normale.

Exercice de déglutition forcée

  1. Avalez votre salive normalement en contractant très fort les muscles de votre langue et de votre gorge.

Pour mieux les contracter, faites semblant d’avaler un gros morceau (par exemple, une cuillerée de confiture).

Manœuvre de Mendelsohn

  1. Commencez par déglutir normalement. Lorsque vous sentez votre gorge et votre pomme d’Adam remonter ou se contracter, faites une pause de 2 secondes, Ensuite, laissez votre gorge se détendre.

Pour faire cette pause pendant la déglutition, retenez votre souffle durant 2 secondes au milieu de la déglutition. Ensuite, laissez votre gorge se détendre. Pour faciliter l’exercice, vous pouvez poser votre main légèrement sur votre gorge. Vous sentirez alors davantage le moment où les muscles remontent vers le haut ou se resserrent pendant la déglutition.

Exercice de déglutition supraglottique

  1. Inspirez et retenez votre souffle.
  2. Déglutissez tout en retenant votre respiration.
  3. Expirez avec force ou toussez pour expulser l’air retenu.

Exercices d’amplitude de mouvement (ROM) de la langue

Exercice de protrusion de la langue

  1. Tirez la langue aussi loin que possible jusqu’à ressentir un bon étirement.
  2. Maintenez cette position pendant 5 secondes.

Exercice de rétractation de la langue

  1. Ramenez votre langue aussi loin que possible à l’arrière de votre bouche, comme pour faire des gargarismes ou pour bailler.
  2. Maintenez cette position pendant 5 secondes.

Exercice de latéralisation de la langue

  1. Déplacez votre langue aussi loin que possible vers la gauche jusqu’à ressentir un bon étirement.
  2. Maintenez cette position pendant 5 secondes.
  3. Déplacez votre langue aussi loin que possible vers la droite jusqu’à ressentir un bon étirement.
  4. Maintenez cette position pendant 5 secondes.

Exercice de renforcement du bout de la langue

  1. Placez le bout de votre langue derrière vos dents du haut ou sur vos gencives.
  2. Tout en maintenant cette position, ouvrez votre bouche aussi grand que possible pendant 5 secondes.

Exercice de renforcement de l’arrière de la langue

  1. Prononcez un son « k » ou « keu » puissant. Effectuez cet exercice en tirant l’arrière de votre langue vers le fond de votre gorge.

Exercices de résistance de la langue

Votre ORL vous indiquera si vous devez effectuer ces exercices et quand les commencer. Pour les effectuer, vous aurez besoin d’un abaisse-langue (mince morceau de bois qui ressemble à un bâton de glace). 

  1. Maintenez l’abaisse-langue fermement en l’appuyant au milieu de votre langue. Poussez vers le haut avec toute votre langue pendant 5 secondes.
  2. Placez l’abaisse-langue juste devant votre langue. Poussez le bout de votre langue contre l’abaisse-langue pendant 5 secondes.
  3. Placez l’abaisse-langue à gauche de votre langue. Poussez la langue contre l’abaisse-langue pendant 5 secondes. Essayez de ne pas faire pivoter le bout de votre langue.
  4. Placez l’abaisse-langue à droite de votre langue. Poussez la langue contre l’abaisse-langue pendant 5 secondes. Essayez de ne pas faire pivoter le bout de votre langue.

Exercice de renforcement de la mâchoire

Exercices d’étirements actifs et d’amplitude de mouvement

Ces exercices peuvent être faits en position assise ou debout. Ne bougez pas la tête pendant que vous faites ces exercices.

  1. Ouvrez la bouche aussi grand que possible jusqu’à ressentir un léger étirement, mais pas de douleur (Figure 2). Maintenez cette position pendant 10 secondes.
  2. Déplacez votre mâchoire inférieure vers la gauche (Figure 3). Maintenez cette position pendant 3 secondes.
  3. Déplacez votre mâchoire inférieure vers la droite (Figure 4). Maintenez cette position pendant 3 secondes.
  4. Déplacez votre mâchoire inférieure en cercle vers la gauche.
  5. Déplacez votre mâchoire inférieure en cercle vers la droite.
Figure 2. Ouvrez la bouche.

Figure 2. Ouvrez la bouche.

Figure 3. Déplacez votre mâchoire vers la gauche.

Figure 3. Déplacez votre mâchoire vers la gauche.

Figure 4. Déplacez votre mâchoire vers la droite.

Figure 4. Déplacez votre mâchoire vers la droite.

Exercices d’étirements passifs

Figure 5. Utilisez vos doigts pour exercer plus de force.

Figure 5. Utilisez vos doigts pour exercer plus de force.

  1. Placez votre pouce sous vos dents supérieures de devant ou sur vos gencives.
  2. Placez l’index de votre autre main sur vos dents inférieures de devant ou sur vos gencives (Figure 5).
  3. Ouvrez la bouche aussi grand que possible. Poussez doucement vos doigts contre vos dents ou vos gencives pour augmenter la résistance. Vous pourrez ainsi mieux empêcher votre bouche de se refermer. L’objectif est de ressentir un léger étirement, mais pas de douleur.
  4. Restez dans cette position pendant 15 à 30 secondes.

Il est possible que votre ORL remarque un changement dans vos capacités de déglutition. Dans ce cas, il vous donnera éventuellement d’autres exercices à pratiquer ou il vous enseignera d’autres manières de déglutir durant votre traitement.

Conseils diététiques

Avoir une bonne alimentation est une part importante de votre traitement contre le cancer. Si vous avez du mal à avaler ou si manger devient douloureux :

  • Vous risquez de ne pas vous alimenter suffisamment. Cela peut vous faire perdre du poids et vous fatiguer.
  • Vous risquez de ne pas boire suffisamment, ce qui peut entraîner une déshydratation.

Votre équipe soignante vous indiquera ce qu’il est préférable de manger et boire durant votre traitement. Votre ORL vous recommandera des aliments et des liquides appropriés, avec la consistance adaptée à votre cas. Lorsque vous essayez de nouveaux aliments (solides ou liquides), veillez à ce que leur consistance réponde aux recommandations de votre spécialiste.

Votre équipe soignante peut également vous conseiller de prendre des compléments alimentaires sous forme de boissons protéinées (Ensure® par exemple) pour augmenter votre apport calorique. Vous pouvez acheter ces compléments alimentaires chez votre épicier habituel, dans une pharmacie ou sur Internet.

Pour plus de conseils diététiques, consultez les pages Bien s'alimenter durant le traitement d'un cancer.

Sécheresse buccale et salive épaisse

En cas de problème de bouche sèche ou de salive épaisse, essayez les solutions suivantes :

  • Buvez 8 à 10 tasses (240 ml) de liquide par jour. Une bonne hydratation rendra la salive moins épaisse.
  • Lorsque vous sortez, emportez toujours une bouteille d’eau ou autre avec vous et buvez-en souvent.
  • Mâchez des chewing-gums ou sucez des bonbons sans sucre. Cela stimulera vos glandes salivaires.
  • Ajoutez des sauces ou d’autres liquides à vos aliments.
  • Utilisez un humidificateur pour limiter l’épaisseur de la salive.
  • Durant la journée, rincez-vous souvent la bouche à l’aide d’une solution éventuellement faite maison. Pour réaliser votre propre solution, mélangez 1 litre d’eau (environ 4,5 tasses), 1 cuillère à café de sel et 1 cuillère à café de bicarbonate de soude. Vous pouvez en boire une gorgée, ou l’utiliser pour vous rincer la bouche ou faire des bains de bouche.

Si ces solutions ne vous soulagent pas, parlez-en à votre équipe soignante. Ils pourront alors vous suggérer d’autres façons de soulager ces symptômes de sécheresse buccale ou de salive épaisse.

Coordonnées

Pour plus d’informations, contactez un orthophoniste de l’Institut d’orthophonie du Memorial Sloan Kettering (MSK). Vous pouvez contacter un spécialiste du lundi au vendredi, de 9h00 à 17h00, au 212-639-5856.

L’institut d’orthophonie (Speech and Hearing Center) est situé au sein du Memorial Hospital à l’adresse :

1275 York Avenue (entre les 67e et 68e rues Est)
Bâtiment Bobst 4e étage, Suite 7
New York, NY 10065

L’institut d’orthophonie (Speech and Hearing Center) se trouve au Centre David H. Koch du traitement du cancer au MSK, à l’adresse :

530 74e rue Est
16e étage, Suite 11
New York, NY 10021

Dernière mise à jour

Vendredi, Février 9, 2024